Valéo à vélo

La vie est faite de rencontres et parfois de retrouvailles.

J’ai rencontré David lors de mon premier Roc d’Azur en tant qu’exposant, à l’époque j’avais investi toutes mes économies pour devenir actionnaire chez Engine-Lab, la marque qui me sponsorisait, dans le but qu’elle puisse fabriquer mes propres vélos. David exposait une boîte de vitesses de vélo, dont la simplicité du système m’avait bluffé. Nous nous sommes revus l’année suivante, lors du lancement de Caminade, une fois que j’ai vu et compris de l’intérieur d'une marque de vélos ce que je ne voulais pas faire. 

J’ai connu Jérôme en école d’ingénieur autour du projet commun Marathon Shell à l’époque où je pensais créer le moteur du futur, celui qui consomme peu et pollue encore moins. Lui voulait être prof et moi travailler sur des voitures de course...c’est l’inverse qui s’est passé. Nous ne le regrettons ni l’un ni l’autre. Nous avons fait le choix de nos dépendances. Il doit parfois envier ma liberté, comme je peux par moment jalouser ses moyens techniques. 

Quand en septembre 2019, Jérôme a franchi la porte de l’atelier Caminade, c’était pour me présenter le projet de VAE à boîte de vitesses automatique intelligente lancé par Valeo, l’équipementier automobile qui a senti le vent tourner. Nous avons discuté du passé, une glissade mémorable à 170k/h dans ma 205 rallye en allant faire du ski nautique, la restauration d’une moto dans la résidence étudiante, nos VTT du début des années 90…et bien sûr du futur.  

Je sais par expérience que la boîte de vitesses est l’avenir du vélo, même si ça fait grincer les dents des vendeurs de dérailleurs. Nous en montons de plus en plus chez Caminade. Et depuis 7 ans, je pressurise David, entre temps devenu le nouveau boss d’Effigear, pour qu’il sorte un modèle 2 axes compatible avec les bridges Pinion.  

La première étape a consisté à fabriquer rapidement un vélo capable d’embarquer la première version du concept et de la tester longuement, me permettant ainsi de mettre en pratique mon diplôme d’ingénieur motoriste. 

La deuxième étape a permis de présenter David à Jérôme, afin que Valéo ne perde pas de temps à ré-inventer la roue, avec dans l’idée, que cette collaboration puisse donner des ailes à la MIMIC qui risque d’équiper tous les vélos Caminade d’ici 1 an. 

La troisième étape a été de concevoir et de fabriquer 5 vélos différents en un temps record. Le vélo de développement, dépouillé et perfusable de capteurs d'acquisition embarqués. Un vélo urbain aux couleurs de la marque avec éclairage, garde boue, béquille et porte bagage latéral. Un cargo type Omnium en titane capable de porter de très grosses charges avec une maniabilité déconcertante. Un VTT semi-rigide "endurisé", notre classique 297+ en titane, permettant aux intégrateurs d’imaginer le concept en tout-terrain. Ces vélos ne préfigurent en rien une future gamme Valéo et encore moins de nouveaux modèles pour Caminade, ils vont juste permettre à Valéo de faire tester la boite à leurs clients : les marques de cadre.

Le vélo comme 2° voiture... la dernière étape.

Le développement du système est encore en cours et les premières productions sortiront de l'usine Valéo en septembre au plus tôt. En parlant d’usine, j’espère qu’elle sera située en France et que le groupe ne cédera pas à l’appel de pays plus ou moins démocratique prêts à payer la quasi-totalité de ladite usine. Une telle mauvaise nouvelle remettrait en question mon projet de troisième ligne de production. 

Il faut se rappeler que notre deuxième ligne de production de vélo collé a permis de démocratiser le titane sur mesure fabriqué en France et même de le rendre concurrentiel au nouveau vélo gravel titane de Décathlon. La seule marque à arriver d’ailleurs à négocier de meilleurs délais avec Shimano, qui à l’instant où je vous parle livre à 600 jours. Heureusement, on roule SRAM et bientôt Campagnolo, avant de prendre comme je le disais plus haut le virage de la boîte de vitesses. 

Pour cette troisième ligne de production, j’ambitionne de me frotter au vélo urbain avec pour objectif de remplacer la deuxième voiture. Un vélo fonctionnel, sécurisant, sécurisé, facile à monter à l’étage, multi-spécialisé et bien sûr assisté. Même si le projet sera basé sur le Smart e-bike System de Valéo, la disruption viendra d’un cadre entièrement injecté en plastique bio-sourcé. L’évolution ultime du système de raccords composites avec du plastique recyclé et des fibres végétales.

Notre savoir-faire de cadreur, doit nous permettre de montrer la voix de la ré-industrialisation à grande échelle. Valéo ne serait pas venu nous voir s’il était facile de fabriquer un vélo, pourtant ça l’est, mais on a oublié comment. L’objectif est on ne peut plus clair pour nous, embaucher une 7ème personne en septembre prochain, qui grâce à cette technologie disruptive pourra fabriquer 1 vélo par jour, du rayonnage des roues à l’emballage en passant par l’assemblage du cadre en deux parties : le projet “ boom-boom “ est officiellement lancé.

Brice EPAILLY