La Garoutade : Un vecteur de lien social

La Garoutade : Un vecteur de lien social

Pour commencer par le commencement : La Garotada en catalan c'est une bastonnade ! Sinon le pitre qui rigole c'est moi, et ça fait quelques mois que je brasse ma bière au sein de La Fabrica. On s'éloigne du vélo je sais... Mais quand je me suis mis à créer du lien social derrière mon vieux bar en zinc de la Fabrica, je me suis dit que fabriquer le produit que je vous propose serait la suite logique de ce qu'on a commencé à faire avec les vélos. Encore une fois ça assainit la relation en mettant le fabricant face au consommateur. C'est simple et efficace, ça vous plait vous souriez, ça vous déplait vous m'en parlez avec bienveillance ! 

Geoffrey Buisan

L'imaginaire d'un espace

Il aurait été clairement plus simple pour nous de déménager l'activité grandissante de Caminade dans des locaux neufs de la nouvelle zone artisanale... Mais la simplicité c'est pas notre marque de fabrique, lorsque nous avons visité la Fabrica, on s'est de suite dit que c'était ici que nous avions envie d'atterrir.

La Fabrica et son espace nous offraient la possibilité de mettre en place notre vision du monde nouveau, celui du Fabriqué avec respect entre autres, dans des domaines plus courants. La place disponible au sein de la Fabrica s'est avérée être un terreau fertile pour nos idées et nos envies. 

Mon imaginaire de l'espace s'était construit autour de ces rendez-vous conviviaux de la saison estivale. Je pense au marché de Montalba le lundi, le marché du petit-bois le mardi à Latour de France. Des moments simples, durant lesquels la convivialité, l'économie circulaire, et le partage de savoir-faire sont les marqueurs de ces soirées. 

Un rendez-vous tacitement reconduit de semaines en semaines, d'années en années.

1653325773.dscf3356.2.jpg

De l'imaginaire au mouvement 

Une fois le modèle bien en tête et clairement affiché, il s'agissait de se mettre en action. Juillet 2021, la fête commence, les jeudis de La Fabrica se programment. L'énergie est déployée pour aller sur tous les fronts : aménagement du lieu, constitution du noyau dur de producteurs permanents, développement du réseau de musiciens locaux et surtout communiquer sur la naissance du lieu !  

Comment faire prendre la mayonnaise ? J'avoue que les événements dont je me suis inspiré sont d'une telle spontanéité que j'avais du mal à imaginer le processus de mise en route, j'avais l'impression que c'était venu s'installer comme ça d'un coup de baguette magique. Alors qu'en fait une armée de fourmis ouvrières doivent cravacher chaque année pour relancer les traditionnels marchés d'été. 

De mon côté il me fallait cravacher encore plus afin de faire connaître l'espace et ses nouveaux résidents. En communication, l'allié N°1 a été l'affichage dans les lieux cibles. Marché de Prades, panneau d'affichage public, bouger, discuter du projet en réel. Contrairement aux vélos Caminade où nous nous efforçons d'activer une communauté virtuelle, le rendez-vous du jeudi soir avait besoin d'une activation de la communauté réelle, ça tombe bien la tchatche c'est mon truc. 

1653325855.news.marcheconcert.2022_1200x

Mais j'ai aussi pu constater la puissance de feu du bouche à oreilles. Le lieu a connu un hiver discret sur les réseaux sociaux et autres moyens d'afficher sa programmation en public. En cause notre volonté de maintenir le lien social malgré le durcissement des contraintes sanitaires. Malgré la dispense de communication, c'est l'underground qui a pris le dessus via un message hebdomadaire d'information, envoyé tous les lundis avec le programme de la semaine. La liste des abonnés s'est construite au fil des rencontres au bar. Dès que des nouveaux visages apparaissaient, dès lors où je sentais la sensibilité de ces personnes pour notre projet, je leur proposais de me donner leur adresse mail. L'authenticité du projet, son caractère bienveillant et ma bonne humeur contagieuse à accueillir de nouvelles personnes dans notre univers ont été des accélérateurs pour le lieu. 

L’expérience estivale m'aura permis de comprendre deux choses fondamentales. Sur le plan philosophique, j'ai compris que ce que je souhaitais voir émerger dans cette espace était le lien social. J'ai pu expérimenter à mes dépens qu'ouvrir ou servir après une heure pivot ne servira plus l'objectif de créer du lien mais plutôt celui de distribuer de l'ivresse. 21 h 30 sera l'heure de fermeture assumée pour notre bar de l'alternative.

Aussi de manière plus cartésienne, j'ai rapidement pu identifier la quantité de bière servie le temps d'un jeudi à la Fabrica. Cette expérience a été précieuse pour dimensionner l'outil de production brassicole... Car oui, dans ma définition du Fabriqué avec respect, il y a un axe sur le juste prix. En minimisant les intermédiaires, le transport, les déchets, et en maximisant le savoir-faire, j'avais la certitude d'inventer un métier de demain, à la fois soutenable pour le vivant et épanouissant pour l'individu. J'ai d'ailleurs décidé de vivre le changement que je voulais voir moi-même émerger au sein de la Fabrica. 

La naissance de la Garoutade

Une petite salle de 12m2 m'aura suffit à implanter ma Micro-Brasserie. Une chape maigre, un bac d'évacuation et un outil de production à 19k€ (tireuse inclue) ont été dimensionnés pour un objectif moyen de 100L de moût fabriqués et vendus par semaine en moyenne. Le matériel choisi a été celui d'une cuve d’empâtage, rinçage et ébullition tout en un afin de respecter les contraintes spatiales. Cette cuve saura brasser jusqu'à 150L de bières pour tenir le rythme soutenu de l'été.  

1653370522.dscf4876.jpg

La fermentation quand à elle s'opère dans des fermenteurs ISO Bar. Comprenez que ces derniers peuvent tenir la pression. Cette technique offre deux intérêts majeurs :

Le premier est un gain de temps sur les cycles de fermentation puisque je profite du CO2 de la première fermentation pour obtenir une boisson carbonatée. Inutile de re-fermenter en bouteille ou en futs, la Garoutade pourra se servir au plus court 11 jours après brassin alors que le processus de re-fermentation double ce temps d'attente.

Le deuxième intérêt tout aussi pertinent est celui de pouvoir brancher ma tireuse directement sur mon fermenteur. Avec cette technique oubliée la mise en fut ou la mise en bouteille avec la vaisselle et les risques d'infection qui vont avec. Mes fermenteurs sont d'une capacité de 79L, le volume limite pour pouvoir les déplacer facilement sur roulette au sein de la Fabrica.  

Maintenant que je vous ai fait étal de mon outil de production, j'imagine que vous vous demandez sûrement quelle bière vous allez pouvoir déguster le soir à la Fabrica ?

Primo, j'essaye de constamment avoir la fameuse blonde rafraichissante pour l'été. Légèrement acidulée et parfumée de houblon, ne dépassant pas les 4° d'alcool, c'est LA bière du lien social. Mais je me garde aussi deux fermenteurs pour expérimenter des Brunes, des ambrées, des IPA, des American Pale Ale, des bières aromatisées aux fleurs locales, bref l'expérience bat son plein avec comme objectif l'apprentissage d'un savoir faire. Ces expériences sont stimulées par des rencontres, un Jeudi, j'ai pu rencontrer un brasseur amateur dont le savoir faire dépasse bien des professionnels.

Pour venir déguster la Garoutade, je vous donne rendez-vous le jeudi soir évidemment, mais aussi le vendredi midi lors de la Co-cantine d'Hélène. Dans un prochain journal, je vous présenterai le deuxième piler fondamental de la Garoutade : le Respect.

Parution : 03/05/2022