Sur un souffle d'indépendance
Ces derniers jours "indépendance" est un mot récurrent parmi les sujets de conversation dans notre région des Pyrénées Orientales, pas tant pour évoquer cette sensation que procure le vélo gravel que pour parler de l'agitation qui règne en Espagne.
Et oui, un rappel pour ceux qui seraient partis faire du gravel bike au fin fond des forêts de l'ex Union-Soviétique, ce 27 Octobre le parlement catalan a déclaré l'indépendance de la province qui devient donc un état sous la forme d'une république. En réponse le gouvernement espagnol a aussitôt dissout le parlement catalan et destitué son président.
Bref vu de notre atelier Caminade d'Ille sur Têt, difficile de s'y retrouver. Aussi la meilleure chose à faire était d'enfourcher mon vélo gravel et d'aller voir par delà les montagnes si la Catalogne n'avait pas changé de place ! Parfois la politique peut servir de bon prétexte pour une virée à vélo.
Facile à dire mais plus long à faire pour un aller retour sur une journée à la force de mes petites jambes. Penché sur la carte j'élabore un itinéraire au plus court empruntant deux des cols historiques qui permirent aux républicains espagnols de fuir le fascisme en 1939. Le col de Coustouges sera mon point d'entrée en territoire indépendant et le col de Morrella avec son passage gravel pour revenir.
Presque 180km au programme, 4 changements de vallées pour 3 500m de D+ avec 3/4 de petites routes bitumées et 1/4 de pistes, pas de quoi faire peur à mon vélo gravel même chaussé de ses pneus tubeless en 700x38mm qui "performent" du bitume aussi bien que du gravier.
Il suffit de dire cela pour crever dans la descente sur route vers Amélie les bains ! Un coup de mèche et ça repart, à peine le temps de se faire chambrer par une petite dame sur le bord de la route.
La montée en pente douce sur Saint Laurent de Cerdan est un régal avec ses vues sur le Canigou.
Je pénètre au cœur de la Catalogne du Nord en traversant Saint Laurent de Cerdans où le temps semble s'être arrété. On ne fabrique plus de sandales depuis longtemps mais les anciens continuent à faire ramayette au soleil en regardant passer les rares vélos.
La bascule en Espagne se fait par une belle descente où le développement de 10 x 42 de ma transmission mono plateau me permet de garder ma vitesse.
En me retournant j'aperçois le village de Coustouges perché à la frontière. Ca y est je suis en Catalogne !
Quelques drapeaux sont accrochés aux fenêtres, les rues des villages plutôt désertes en ce 1er Novembre et aucun signe d’effervescence particulière.
Le réseau de pistes, chemins et voies vertes catalans sont parfaitement adaptés à la pratique du vélo gravel.
Initialement prévus pour le VTT, il n'y a qu'à suivre les panneaux.
Peu importe l'itinéraire emprunté, le vélo gravel autorise toutes les improvisations de terrain, et tant mieux si la route du retour vers Ceret se transforme en piste.
Le col de Morrella semble vouloir décourager les voyageurs motorisés mais offre le point de passage idéal en gravel bike.
En 1939 beaucoup de républicains espagnols fuyant le fascisme ont du l'emprunter aussi à vélo, en une période où la notion de gravel serait apparue bien futile
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Heureuse époque européenne que la notre qui nous préserve à présent de ces conflits et luttes fratricides.
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trace, texte et photos : Sylvain Renouf
Parution : 02/11/2017