Le journal des cons finis - Semaine #7

7 semaines de confinement ça change un homme ( et sa femme ), mais peut-être pas la société tout entière, ça sera plus long et il faudra certainement d’autres piqûres de rappel : catastrophiques ou autoritaires.

Brice EPAILLY

Dernièrement je lisais une information sur la société Airbus qui vient d’obtenir de nouvelles facilités de crédit de 15 milliards d'euros afin de doubler ses liquidités disponibles et faire face à la crise induite par le Covid-19. Zéro commande en février et c’est l'affolement général pour ce fleuron national qui a un carnet de commande plein de 7670 avions qu’il va mettre 8 ou 9 ans à livrer et dont le dernier chiffre d’affaire est de 70.5 milliards d’euros. J’en ai donc déduit qu’un bon fond de roulement ne devait pas être juste de 3 mois de CA ( Chiffre d’Affaire ) comme je l’avais appris dans le CA ( Conseil d’Administration ) de mon collège mais d’une demi année au cas où… et j’ai fait mes comptes, pour savoir si la situation de Caminade était confortable ou inquiétante. Nous n’avions de notre côté qu’un carnet de commande de 2 mois et 4 mois d’équivalent CA en fond de roulement. Heureusement, contrairement à Airbus les commandes ont continué. Certes nous avons fait 3 semaines quasi blanches mais après comme dirait l’autre c’est reculer pour mieux sauter… ouf on est sauvés ! De deux choses l’une, ou Airbus fonctionne sur un système Madoff ( les nouveaux clients payent les avions qui se fabriquent en ce moment ) ou alors ils ont besoin de liquidités pour trouver un autre produit capable de continuer à faire tourner les usines dans 10 ans et ainsi sauver l’emploi. J’ose espérer qu’on est sur la deuxième idée même si j’ai un peu peur de là où ils veulent aller... 

La semaine dernière j’ai reçu un mail d’une entreprise spécialisée en impression 3D ( on utilise cette technologie sur certaines pièces complexes en acier ou titane ainsi que sur les moules de nos  manchons ) qui m’expliquait que la fabrication additive serait une des pièces maîtresses des nouveaux drones de livraison qui entreraient en fonction d’ici 3 ans. Et si Airbus avait décidé de tuer le game dans la course qui oppose les futurs droïdes de livraison du dernier kilomètre aux actuels livreurs en cargo bike ? S'il avait compris que l'avion n'était pas l'avenir de l'homme : moins de monde à bord, plus de vols intérieurs... ils serviront à déplacer beaucoup de fret rapidement ( car le bateau ça oblige à trop stocker ) et non plus à transporter la middle class. Maintenant que nous avons pris goût aux joies du confinement, l’idée est d'augmenter la quantité de nos livraisons à domicile. Quantité inversement proportionnelle à nos libertés, mais soit disant proportionnelle à notre bonheur de sur-consommateur. Et oui pour que la machine à profit de ce capitalisme industriel continue à fonctionner, il faut que les consommateurs consomment. Avant c’était la guerre, puis les voitures, maintenant c’est Netflix et Amazon. Bien sûr les plus riches continueront à prendre l'avion dans le cadre de leur travail ( la règle des 100km de vaudra pas pour ceux qui sont en haut de la pyramide ) et même de leurs loisirs... ils pourront presque y jouer au golf à l’intérieur grâce aux mesures de distanciation en vigueur. 

Et Caminade dans tout ça ? nous livrons aussi des vélos… ces drones seront-il capable de soulever les 25kg de l’encombrant colis. J’ai ouïe dire que ça bossait aussi sur les taxis drones… on arrête pas le progrès du toujours plus ! Pourtant, c’est pas à ça que je rêve... Il me tarde le jour où les vélos Caminade ne seront vendus que dans notre département, ou au pire dans un rayon de 100km, puisque ça a l’air d’être le nombre d’or du moment, même si Orwell l'avait déjà anticipé dès 1949 dans son roman "1984". Cela voudra dire que les gens auront fait le choix du vélo à la place de la voiture, qu’ils auront compris que favoriser le local c’est créer de l’emploi local et du coup qu'il y aura un cadreur/réparateur/rêveur dans chaque département. ne vous inquiétez pas, on pourra encore commander en ligne et se faire livrer au Drive du papier hygiénique qui sortira de l'usine de masque ( on peut toujours rêver )... mais je suis sûr qu'on trouvera de plus en plus de produits locaux voire même de compétences locales pour rallonger la durée de vie des produits. Même si comme dirait Coluche, " on est tous égaux, mais si... " tu es lié de près ou de loin à la vie d'une mégapole " ... alors pour toi ça sera très dur ! ".

Parution : 04/05/2020